Paper Girls T1, par Vaughan, Chiang et Wilson

Une séquence années 80, ça vous branche ?

Salut, toi !

Serait-ce le grand retour des articles ? Eh bien... Pas tout à fait. Comme j'ai pu le publier sur la page Facebook et le compte Twitter liés au blog, je mettais l'écriture des articles en pause pour me donner le temps de gérer mes cours, mes deux jobs, et la refonte du blog. Et devinez quoi ? Cette organisation se passe moins bien que prévu ! Cela dit, je continue tant bien que mal de lire, aussi je tenais tout de même à écrire un petit article sauvage alors que je n'ai pas du tout refait le template du blog ni rien (quoique les photos d'intro se remplacent, petit à petit...). Il s'agit là d'un petit bijou qui vient d'arriver chez nous, signé Brian K. Vaughan : Paper Girls.

Oui, j'ai parlé d'une autre série de Vaughan il y a deux articles (Saga), et la balance commence à pencher en sa faveur, mais je profite du comic que ma sœur m'a prêté ! (et d'ailleurs, accrochez-vous, car THE ESCAPISTS me tente bien pour les jours à venir !)

Les sublimes couv' de chapitre, avec de gauche à droite : les Papers Girls, Mac, Tiffany, KJ et Erin.

Octobre 1988. Au lendemain de la nuit d'Halloween, la petite ville de Stony Stream, Ohio, s'éveille. C'est du moins le cas de Mac, KJ, Tiffany et Erin, quatre jeunes livreuses de journaux qui préparent déjà leur tournée. Aux menaces des bandes d'adolescents attardés et de la police locale un peu trop zélée vont se succéder des évènements qui changeront à jamais la vie des quatre jeunes filles et, avec elle, l'histoire de l'humanité toute entière. (Résumé issu de la quatrième de couverture)

Inconsciemment, ce personnage m'a rappelé Prince IV dans Saga...

Comme pour beaucoup de livres que je lis ou de films que je vais voir au cinéma, je n'ai pas lu le synopsis de Paper Girls avant de l'ouvrir. Je préfère nettement me plonger dans l'histoire et me laisser surprendre par le contexte, les images, la narration. Et forcément, en faisant cela, je découvre tout et mes réactions ne sont pas influencées par ce que je sais en ayant lu le résumé. C'est de cette manière que j'ai pu me demander éhontément "WTF" au fur-et-à-mesure que j'avançais dans l'histoire. Si au départ les problèmes que rencontre Erin (et par la suite sa bande avec Mac, KJ et Tiffany, dont elle fait la connaissance en route) sont somme toute mineurs (des adolescents en état post-Halloween l'ennuient lourdement ; elle tombe sur la police en étant avec Mac...), la situation va vite dégénérer sans même crier gare.
C'est bien simple : l'histoire devient très étrange avant même que vous ne vous en rendiez compte ! Si au départ un racket de talkie-walkie semblerait normal dans un tel contexte, on comprend rapidement que les voleurs (qui parlent une langue étrange, mais après tout, n'est-ce pas le lendemain d'Halloween ?) ne sont vraiment pas normaux quand ils laissent tomber derrière eux - et je rappelle que nous sommes en 1988 - une sorte d'iPod avec la pomme caractéristique de la marque bien visible. Tout cela sans compter la découverte d'une machine étrange et organique dans une cave ; le visage boursouflé des voleurs... et leur désintégration à terme.

Tiffany, comme ses camarades, est vraiment cool.

Mais je n'en dis pas plus et vais plutôt parler d'un autre point intéressant de Paper Girls : les couleurs. Je pense que cela vaut le coup d'en parler : Matt Wilson a vraiment fait un travail incroyable sur les couleurs, qui donnent une réelle ambiance aux images en fonction des évènements. A savoir que Matt Wilson a également travaillé sur les couleurs de The Wicked + the Divine ! Et pourtant, le traitement dans Paper Girls est tout autre, plus en aplats de couleurs brutes, mais plus fantaisiste dans les correspondances entre les roses, les bleus, les violets... Ces correspondances répondent bien au contexte des années 80 (ce qui m'évoque également les musiques de ces années-là - on n'a jamais assez de néons colorés), mais aussi à cette dimension un peu futuriste et fantastique qui vient s'ajouter à la vie routinière des jeunes filles, chargée de dinosaures volants et de mystère.


Ne négligeons pas non plus le dessin de Cliff Chiang (auteur qui a par ailleurs travaillé sur une série Wonder Woman) qui, je trouve, s'adapte parfaitement à l'histoire et est parfois très inventif (je pense à une scène de flashback qui renverse les codes de la page, traditionnellement au format portrait, nous forçant à retourner l'album pour lire la séquence d'images à la forme un peu rétro. Cette forme me rappelle notamment l'écran d'une télévision, ou des tableaux de texte que l'on retrouvait dans les jeux vidéo de l'époque). A mon sens, Chiang maîtrise à merveille les émotions des personnages (les expressions du visage sont superbes) et le traitement des choses étranges (monstres, machines organiques, etc.).

Il se passe dans Paper Girls quelque chose qui nous dépasse autant que cela dépasse les héroïnes. Très tôt, un premier novembre, la situation devient urgencielle, forçant des préadolescentes à réfléchir et à réagir vite pour sauver leur peau, alors même qu'elles ne connaissent pas la nature ou l'origine de la menace ! Et cette dimension particulièrement bizarre et incertaine semble caractéristique de l'écriture de Vaughan. J'ai retrouvé l'étendue de son imagination folle dans Paper Girls, alors qu'on est dans un univers bien différent de Saga, bien plus ancré dans la réalité historique (l'année 1988, le petit quartier résidentiel américain où des ados jettent les journaux, les panneaux pro-Bush plantés dans les jardins... Et d'ailleurs, pour me mettre dans l'ambiance, j'écris cet article en écoutant l'OST de Kung Fury, hommage aux années 80). On se prend de sympathie pour ces quatre jeunes filles qui n'ont rien demandé à personne et qui comprennent à peine ce qui se passe, ce qui nous laisse dans le questionnement le plus total. Nous sommes ainsi forcés de constater que si on n'avait pas réagi comme elles, on n'aurait sans doute pas survécu à la menace qui pèse sur Stony Steam. On comprend assez rapidement que le destin de l'humanité repose sur quatre livreuses de journaux.


Si vous avez aimé Saga, et même si vous n'avez pas lu Saga (que je recommande toujours), vous pouvez lire Paper Girls en toute confiance. Brian K. Vaughan montre à nouveau l'étendue de son talent d'écriture avec une histoire où chaque détail trouve sa place et s'imbrique dans un fil narratif complexe sans jamais être dénué d'intérêt. Vaughan introduit ici quatre jeunes filles déjà fortes de leur caractère, celles qui feront toute la différence dans les évènements à venir. C'est un réel plaisir de voir qu'un aussi bon scénariste porte un intérêt si particulier à tous types de personnages au fil de ses histoires. C'est tout aussi agréable de voir une si chouette histoire accompagnée du dessin expressif de Chiang et des couleurs oniriques de Matt Wilson. Bonne lecture à vous !


A bientôt !


Le site de Cliff Chiang : Cliff Chiang
Le blog de Matt Wilson : SeeEmWhyKay



© Vaughan, Chiang, Wilson,
Urban Comics (coll. Indies)
Fiche informative :

  • Titre : Paper Girls T1
  • Scénario : Brian K. Vaughan
  • Dessin : Cliff Chiang
  • Couleur : Matt Wilson
  • Pages : 160
  • Éditeur : Urban Comics, collection Indies
  • Prix éditeur : 10 euros (prix de lancement)
  • Année d'édition : 2016
  • ISBN : 979-1-026-81045-2


Les images contenues dans cet article sont issues de l'ouvrage dont il est question ici, à l'exception de la photographie d'introduction qui m'appartient.

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